Le verre structurel fait son entrée dans le secteur du batîment
Mais il faut encore des normes claires pour l'utiliser comme élément porteur

Le verre est omniprésent dans l'architecture moderne. Les grandes baies vitrées n'ont plus rien d'exceptionnel depuis longtemps. Mais actuellement, on examine de plus en plus les possibilités du verre structurel, utilisant ce dernier comme élément porteur. Cela permet de créer notamment des murs, des toits et des escaliers en verre. Pour cela, les producteurs tiennent compte de toutes les phases du verre, de l'utilisation classique jusqu'à l'éventuelle rupture. Pour le moment, les normes et les prescriptions techniques en Belgique sont très limitées, ce qui limite considérablement la diffusion à grande échelle du verre structurel.
Qu'est-ce que le verre structurel?
Matériau porteur
Le verre structurel fait partie du verre architectural avec une application comme élément porteur. En plus de se supporter tout seul, il est capable de supporter des charges éventuelles. En soi, cela ne nécessite aucune modification du verre en tant que produit. On effectue seulement des petites adaptations afin qu'il puisse être porteur.
Verre trempé ou non trempé
choisir du verre non trempé ou trempé. Pour obtenir du verre trempé, on ajoute à la production une étape qui consiste à placer le verre dans un four. Le matériau est alors rapidement chauffé et surtout rapidement refroidi. Cela crée une force de compression à la surface de la plaque de verre, tandis qu'une force de traction est créée à l'intérieur. En d'autres termes, ce processus crée des tensions dans le verre. Et cette tension permet d'absorber les charges de traction possibles lors de l'application (par exemple la fixation sur les bords du verre). Grâce à ce traitement, le verre trempé peut résister à des charges plus lourdes. Mais l'inconvénient de ces tensions est qu'en cas de rupture, le verre trempé se brisera toujours en très petits morceaux. Et ces petites pièces n'auront plus aucune capacité portante. En revanche, le verre non trempé se brise en gros morceaux qui peuvent encore fonctionner ensemble et qui ont donc encore une certaine capacité portante après la rupture.
Le type (trempé ou non trempé) à utiliser dépend de l'application spécifique. Par exemple, dans le cas d'un plafond en verre, il est préférable, pour des raisons de sécurité, d'avoir des petits morceaux en cas de rupture. Cependant, cela reste un exercice difficile de choisir le bon type. C'est pourquoi certains fabricants travaillent avec des combinaisons de verre, associant des feuilles de verre trempé et des feuilles de verre non trempé dans un stratifié.
Finition durable

Il existe déjà de nombreuses solutions pour donner au verre une finition durable. Ces solutions peuvent facilement s'appliquer au verre structurel. Ces dernières années, il y a eu de nombreux développements dans le domaine de l'énergie et de la climatisation. Par exemple, le revêtement du verre permet de ne laisser passer qu'un certain pourcentage de la lumière du soleil et de réfléchir le reste.
Le verre isolant avec une cavité et le verre feuilleté – qui se compose de deux plaques de verre collées entre elles avec une couche intermédiaire – peuvent également être utilisés de manière structurelle.
Application
A l'intérieur comme à l'extérieur
Les possibilités d'application du verre structurel sont très larges. Le matériau peut être utilisé aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur. Il peut s'agir de choses plus simples, comme une balustrade en verre. Mais des éléments plus structurels, comme des murs, des toits, des escaliers en verre sont également possibles.
Application limitée
Bien que les constructions simples en verre structurel se retrouvent régulièrement dans l'architecture, l'utilisation d'éléments structurels est encore très limitée. Il y a plusieurs raisons à cela, comme le caractère plutôt conservateur des organismes de contrôle concernés. Cela crée un frein général, si bien que le verre structurel est encore relativement peu connu des clients potentiels (p. ex. les entreprises).
Production
Conception
Pour la conception en verre structurel, on travaille aussi bien avec les outils de calcul classiques qu'avec des outils de calcul spécialement conçus pour chaque entreprise. La détermination de la charge et/ou de la résistance possible est purement axée sur le matériau, si bien qu'on peut utiliser des outils de calcul ordinaires (classiques). Mais comme plusieurs entreprises ont leurs propres développements pour le verre structurel, on utilise également des outils de calcul plus spécifiques - qui fonctionnent entre autres selon la modélisation numérique et utilisent les méthodes des éléments finis.

Points d'attention lors de la production
La production de verre structurel se fait de la même manière que tout autre type de verre. Le matériau est généralement fabriqué en panneaux en ligne float. Ensuite, il est envoyé à l'entreprise de transformation du verre, où il est découpé à la bonne taille et où il peut également être trempé et/ou stratifié.
En tout état de cause, un certain nombre de points cruciaux doivent être pris en compte lors de la production. Premièrement, les tolérances dimensionnelles. En effet, ces tolérances sont très faibles car il faut absolument des dimensions correctes pour l'installation (voir ci-dessous). Deuxièmement, dans le cas de verre stratifié, il faut superposer les différents panneaux de verre avec la plus grande précision. Mais il s'agit d'une question esthétique plutôt que constructive.
Enfin, ces considérations esthétiques sont également décisives pour le dernier point d'attention. Il faut veiller à ce que le panneau de verre ne soit endommagé à aucune phase du processus - non seulement pendant la production, mais aussi, par exemple, pendant le transport et l'installation. En effet, le client ne veut pas de vitrage dont il manque un coin.
Collage
On préfère souvent coller plutôt que forer dans le verre. Pour pouvoir percer, il est nécessaire de travailler avec du verre trempé. Il n'y a que comme ça que la plaque de verre peut supporter la concentration de tensions causée par les trous de forage.
Cependant, le collage est confronté à de nombreux défis. Par exemple, il n'est pas toujours facile de choisir la bonne colle, car il existe de nombreux produits différents - avec des propriétés différentes. Par exemple, avec les intercalaires pour verre feuilleté, on peut utiliser entre autres un poly(butyral vinylique). D'autres applications nécessitent un collage structurel, par exemple avec de la résine époxy, du silicone, de l'acrylique, etc.
De plus, il est parfois difficile pour les fabricants de donner une garantie sur les produits adhésifs, ce qui entraîne un problème avec l'assurance. Par ailleurs, il est préférable d'effectuer le collage dans un environnement très propre. Cela permet d'éviter que des particules de poussière ou de déchets ne se glissent entre les différents éléments de l'assemblage, ce qui est crucial pour une bonne adhérence. Si le collage doit être effectué sur un chantier de construction, le risque de pollution est considérablement plus élevé.
Points importants lors de la pose
Faibles tolérances
Un premier point d'attention lors de l'installation du verre structurel est qu'il faut tenir compte de faibles tolérances. Une plaque de verre doit toujours être placée avec précision à l'horizontale, avec peu ou pas de différence sur les points d'appui. En effet, le verre est un matériau rigide qui peut se briser s'il s'écarte trop des points d'appui.
Contact dur
Deuxièmement, il ne doit jamais y avoir de contact direct entre le verre et un matériau dur (p.ex. aluminium ou acier). Généralement, entre le verre et le patin, on prévoit du caoutchouc, du plastique ou de la colle afin que le verre soit bien soutenu et que le contact dur soit évité. Il est essentiel afin de ne pas créer de grosses tensions sur le bord du verre. Cette tension est une cause importante de bris de verre.
Restrictions mecaniques
La plus grande restriction mécanique du verre structurel est qu'il s'agit d'un matériau fragile qui s'affaiblit avec le temps. Cet affaiblissement est dû aux rayures minuscules et inévitables qui apparaissent pendant la production. Comme ces rayures se développent avec le temps, le matériau s'affaiblit au fil du temps. Même si ce processus s'étale sur des dizaines d'années, il doit être pris en compte dans la conception.
Solutions coûteuses
Aujourd'hui, il existe plusieurs solutions pour compenser cette restriction mécanique mais pour l'instant, elles sont encore très coûteuses. Un premier exemple est le type de verre à la fois mince et résistant qui est utilisé pour les écrans de smartphone. Ainsi, l'écran est beaucoup plus résistant aux rayures. Mais même si la quantité de verre requise à cet effet est relativement faible, cela fait grimper considérablement le prix des smartphones.
En outre au niveau européen, l'Université de Gand en collaboration avec Vitroplena, entre autres, mène de nombreuses recherches sur les possibilités et le développement de ce que l'on appelle le 'self-healing glass', avec lequel les minuscules rayures inévitables se restaurent toutes seules grâce à un revêtement ou un traitement supplémentaire après la production. Cette recherche n'en est encore qu'à ses débuts mais elle est déjà prometteuse. Le verre auto-cicatrisant permettrait d'exploiter toute la solidité du verre. On pourrait alors avoir un verre plus mince et plus esthétique.
Sécurité
Normes
Bien qu'il existe en Belgique des normes et des prescriptions techniques pour les portes et les balustrades en verre, celles-ci ne concernent pas encore le verre structurel. Les producteurs peuvent en tenir compte pour calculer les tensions du verre laminé et la résistance de la conception. Mais ils jouissent également d'une grande liberté pour essayer toutes sortes de choses et de combinaisons de verre.
Entre-temps, une norme européenne pour le verre est en cours d'élaboration par les autorités compétentes. Elle conduira à un nouvel Eurocode. Cette norme - qui deviendra l'Eurocode 10 - devrait normalement être prête dans trois ou cinq ans. Cependant, l'ampleur exacte de l'Eurocode n'est pas encore tout à fait claire.
Calculs de construction
Pour le calcul de la structure du verre structurel, il faut d'abord tenir compte de l'aspect temporel. En effet, en raison des (petites) rayures inévitables sur la surface, le verre s'affaiblit avec le temps.
De plus, les niveaux de sécurité pendant toutes les phases du verre sont particulièrement importants. Il s'agit bien sûr de la phase d'utilisation (parfois appelée phase de pré-rupture), mais il faut également considérer la phase de rupture éventuelle et la phase post-rupture consécutive. En effet, même dans ce cas, le verre doit toujours avoir une capacité de charge suffisante, entre autres pour pouvoir évacuer l'espace si nécessaire et pour pouvoir remplacer le verre sans problème majeur.
Quid en cas de bris de verre?
Diagnostic du dégât
En cas de bris de verre structurel, il est important d'effectuer un diagnostic approfondi des dommages. On examine alors comment, où et pourquoi une rupture s'est produite. Ce genre de diagnostic est nécessaire, entre autres, dans le cadre d'une procédure judiciaire, mais il peut surtout aider à éviter un dommage similaire à l'avenir.
Remplacer le verre
Comme le verre est généralement choisi pour des raisons esthétiques, il est important qu'il puisse être facilement remplacé en cas de bris de verre. Les concepts sont encore en cours d'élaboration mais ils présentent une certaine urgence étant donné l'avantage supplémentaire qu'ils offrent au niveau de l'installation. En effet, si le remplacement peut être effectué facilement et en toute sécurité sur le plan structurel, le verre peut également être installé durant l'une des dernières phases du processus de construction (on évite ainsi les dégâts pendant le processus de construction).
Que nous reserve l'avenir?
Les développements permettent de dépasser les restrictions
Bien que l'utilisation du verre structurel soit limitée pour l'instant, ce matériau a la vent en poupe. En effet, ces dernières années, de nombreux développements ont fait du verre un matériau de construction intéressant. Il y a les nouveautés dans le domaine de l'isolation et de la climatisation, mais les développements concernant le verre renforcé (et éventuellement le verre auto-cicatrisant) ont également une influence importante.

Les solutions plus pratiques jouent également un rôle, par exemple un revêtement spécial qui empêche le verre de se salir (ce qui est utile, par exemple, pour une utilisation sur une toiture en verre). Finalement, la taille des panneaux n'a presque plus de limite parce que le plus grand autoclave du monde (qu’on peut trouver en Allemagne) permet de laminer des panneaux de verre de 3 mètres sur 19 mètres.
Convaincre
Une grande partie des restrictions du verre (structurel) a déjà été surmontée grâce à toutes sortes de développements. Le principal défi pour le secteur aujourd'hui est de convaincre les autorités de contrôle et les clients potentiels des possibilités du verre structurel.