“LA SECURITE AVANT TOUT”
BART DELAMEILLEURE (BACOBOUW) INVESTIT DANS DES CONDITIONS DE VIE ET DE TRAVAIL SURES
Il est difficile de nier que Bart Delameilleure a le métier d’entrepreneur dans le sang. Dès ses treize ans, Delameilleure a rejoint l’entreprise de construction de son père et dix-sept ans plus tard, il a fondé sa propre société Bacobouw. Deux ans plus tard a suivi la filiale Delbogro. Deux entreprises florissantes, mais pourtant, il semblait en 2009 que tout serait démantelé. Kenny, le fils Delameilleure, est tombé dans le coma après un accident et l’entrepreneur a sciemment pris ses distances avec l’affaire. Entre-temps, le père et le fils sont toutefois à nouveau aux commandes et portent ensemble une troisième société sur les fonts baptismaux.

UN PARCOURS CAPRICIEUX
“Avec cette nouvelle société, nous repartons de zéro,” entame Delameilleure, “mais nous sommes confiants. Ce n’est pas la première fois que nous créons quelque chose à partir de rien.”
Entreprise familiale
Delameilleure a grandi sur chantier. Il n’avait que treize ans quand il s’est engagé auprès de son père, et il y est resté actif jusqu’en 1997. “J’y ai tout appris”, dit-il. “Du maçonnage au coulage du béton et aux travaux de toiture, mais aussi la gestion d’une société. Au cours des dernières années, ma femme et moi étions en principe entièrement responsables des aspects commerciaux, effectivement sous la surveillance de mes parents.”
Delameilleure n’a pas repris l’entreprise de son père pour une question d’échelle. “La société était trop grande pour nous. C’était tout simplement irréalisable. Lorsque mon père a décidé d’arrêter, j’ai donc travaillé entièrement pour moi. Cela a débuté par une société unipersonnelle et pas beaucoup plus tard a suivi Bacobouw, l’entreprise de construction que je dirige avec ma femme Conny.”
Bacobouw & Delbogro
Bacobouw a été fondée en 2002 comme entreprise de construction générale, axée sur tous les types de projets résidentiels de A à Z. “En fait, nous avons recommencé complètement,” confie Delameilleure, “même si l’expérience acquise dans l’entreprise de mon père nous a effectivement bien servi.” Heureusement, les clients de l’entreprise familiale ont vite rejoint Bacobouw et le bouche à oreille a résulté dans une belle croissance de la nouvelle société. A peine deux ans plus tard, Delameilleure a estimé que le moment était propice pour lancer une seconde société. “Avec Delbogro, qui se spécialisait encore à ce moment-là dans les travaux de terrassement et de béton, nous parcourions à nouveau tout le trajet. Une ardoise vierge, une nouvelle société et puis construire.”
Tragédie
En 2009, les deux sociétés étaient bien implantées dans le marché. Bacobouw employait quelque 21 ouvriers et le fils de Delameilleure était prêt à reprendre la direction de Delbogro. Jusqu’à ce que le sort frappe. Après un accident, Kenny Delameilleure est tombé dans un coma profond et une longue période d’insécurité et, ensuite, de rééducation, a suivi.
“Mon fils luttait pour survivre”, confie Delameilleure. “Vous ne pensez pas à votre affaire dans ce cas. Nous avons donc mis les deux entreprises sur pause. Nous avons veillé au suivi des chantiers en cours et à l’engagement de notre personnel ailleurs – certains se sont lancés comme indépendant, d’autres ont travaillé chez des entrepreneurs à proximité – et nous avons tout stoppé. Nous n’avons repris les affaires que quand nous avons su que la rééducation de Kenny serait achevée.” Et c’est ainsi que Delameilleure et sa famille sont entièrement repartis de zéro.
Nouveau départ
Après huit mois, les activités de Bacobouw ont été reprises, mais avec un nouveau personnel limité. “Comme nous avions donné un autre emploi à notre personnel, nous devions chercher une nouvelle main-d’œuvre”, précise Delameilleure. “Naturellement, ceci n’était pas toujours une mince affaire, mais entre-temps, j’ai à nouveau une équipe de huit sur laquelle je peux compter. Ce sont des personnes que j’ai formées et qui maîtrisent tous les aspects du métier d’entrepreneur. J’estime ceci important, même si, comme avant, nous recourons aussi à un arsenal attitré de sous-traitants pour notamment l’électricité, le HVAC, la menuiserie, les travaux de toiture et de charpente.” Si Bacobouw a débuté plus ou moins de la même manière après l’interruption, il en fut hélas autrement pour Delbogro.
“J’avais créé Delbogro pour mon fils,” raconte Delameilleure, “et je voulais que cela reste ainsi. Mais comme il a gardé de son accident un bras paralysé, ce n’était pas possible dans la forme originale. C’est pourquoi nous avons changé notre fusil d’épaule et avons restructuré Delbogro en société de location. Aujourd’hui, celle-ci est notamment responsable du matériel roulant de Bacobouw.”
Amiante
Entre-temps, tant Delameilleure que son fils sont actifs depuis plusieurs années. Mieux encore, ils ont suivi ensemble une formation de quarante heures pour éliminer l’amiante via le centre de formation Praxis. Non seulement cela leur permet de donner des formations, mais cela leur donne aussi d’emblée la base pour un nouveau défi: après deux ans de préparation, ils ont créé au début de cette année Asbest-Stop, une nouvelle entreprise agréée de travaux de démolition et d’élimination de l’amiante, qui prend place aux côtés de Bacobouw et Delbogro.
“UNE REGLEMENTATION STRICTE N’EST PAS UN NON-SENS”
Finis les cow-boys
Asbest-Stop répond à un important besoin du marché, d’après Delameilleure. “Le nombre d’entreprises réellement agréées pour les travaux de démolition avec élimination de l’amiante est limité en Flandre”, dit-il. “Nous sommes même les seuls en Flandre occidentale. Et ce, alors que la réglementation est considérablement plus stricte cette année.” L’une des mesures inscrites à l’agenda en 2018 est l’inventaire obligatoire des matériaux de construction contenant de l’amiante lors de la vente d’un logement. L’inventaire fera partie du Woningpas. “Une bonne chose”, estime Delameilleure. “En effet, de nombreuses personnes ne sont pas conscientes de la présence d‘amiante dans leur habitation. Elles entament de petits ou grands travaux de démolition sans être conscientes des risques encourus.
Plus frappant – et plus problématique – encore est le fait que de nombreux entrepreneurs font preuve d’insouciance à l’égard des matériaux et des mesures de protection. Au cours des années où j’ai été impliqué dans les travaux de démolition et donné cours dans le commerce de détail en démolition, j’ai vu commettre bien des erreurs. Heureusement, notre agréation nous permet de contrôler les entreprises non agréées et de rapporter aux pouvoirs publics. J’espère ainsi que de plus en plus de mesures seront prises contre de telles mauvaises pratiques.”
Investir dans la sécurité
Pour Delameilleure, il est primordial que tout se déroule dans les règles chez Asbest-Stop, même si l’agréation officielle de l’entreprise réclame un investissement conséquent. “L’une des conditions d’agréation est la libération intégrale de 85.000 euros”, explique Delameilleure. “Pour satisfaire en plus à toutes les exigences de sécurité, vous avez besoin de pas mal de matériel. En définitive, nous avons encore investi quelque 60.000 euros dans les équipements de protection, dont une installation d’aspiration spéciale qui renouvelle entièrement l’air jusqu’à quatre fois par heure dans un espace donné.” Par ailleurs, Delameilleure fait procéder à un contrôle par l’état à chaque libération et veille à ce que tous les membres du personnel disposent des bonnes formations et attestations.
“Naturellement, ceci fait que nous sommes un intervenant onéreux,” admet l’entrepreneur, “mais je crois que cela favorisera fortement l’acceptation des entreprises agréées dans les prochaines années. La réglementation ne s’assouplit guère et je m’attends à ce que les pouvoirs publics prévoient les primes requises pour les particuliers qui font appel à une entreprise de démolition agréée.”
Mais c’est aussi une question de conviction. “La réglementation et les conditions strictes pour l’agréation ne sont vraiment pas un non-sens,” confie Delameilleure, “et elles justifiaient chaque centime dépensé. Les risques sont trop importants et j’ai vu assez de malheurs dans ma vie pour savoir qu’investir dans la sécurité de chacun, tant celle des occupants et utilisateurs que celle de mon personnel, est payant.”
“LES PERSONNES VALENT DE L’OR”
Les membres du personnel sont pour Delameilleure bien plus que de simples ouvriers. “Les bonnes personnes – des personnes de confiance – valent leur pesant d’or”, confie-t-il. “Mais cela signifie que vous devez veiller sur elles. Par exemple en leur offrant des conditions de travail agréables et sécurisantes ou en concluant des accords de collaboration étroits avec certains sous-traitants.”
“Ce que bien des employeurs semblent oublier”, ajoute Delameilleure, “c’est que vous devez aussi investir dans votre personnel. J’entends des entrepreneurs et des entreprises se plaindre régulièrement de ne pas trouver les personnes qualifiées, mais quelle en est la cause? Ils veulent que quelqu’un soit rentable dès le tout début, mais en même temps, ils ne sont pas prêts à le former correctement. Cela ne marche évidemment pas comme cela. Vous devez donner aux gens l’opportunité d’apprendre et de grandir, à tous points de vue. Celui qui débute chez nous, suit toute une formation. Dans la plupart des cas, je la dispense moi-même, ce qui renforce les liens, bien entendu, mais le plus important est qu’ils maîtrisent le métier d’entrepreneur de A à Z. Dans les entreprises plus grandes, je vois régulièrement que chacun a sa tâche spécifique, mais je ne crois pas en cela. Les gens ne sont pas des numéros et l’alternance est ce qui fait la beauté de ce métier. Je veux que chacun se sente bien ici et puisse agir par lui-même. Un ancien ouvrier qui se lance avec succès comme indépendant … voilà qui est le plus beau compliment.”