BIM-READY, QU'EST-CE QUE ÇA VEUT DIRE?
LE FOSSÉ ENTRE LE FABRICANT ET L'UTILISATEUR ENTRAVE-T-IL LE VÉRITABLE POTENTIEL?
BIM comporte de belles promesses. Une construction plus intelligente et plus durable, une collaboration plus étendue entre les différents partenaires de la construction, un coût d’échec réduit … guère étonnant à ce que de plus en plus de concepteurs le considèrent comme l’avenir de la construction. Et les fabricants s’en rendent compte peu à peu. En rendant leurs produits disponibles comme objets BIM, il espèrent faciliter le processus de construction réel, mais également virtuel. Mais qu’offrent précisément ces objets, et peuvent-ils aider effectivement à alléger le travail de modélisation intensif du concepteur?

LE POTENTIEL D’UN BON CONTENU BIM
Construction virtuelle
Ces dernières années, la prise de conscience autour du Building Information Modelling, en abrégé BIM, a énormément progressé. La Belgique continue d’être un peu à la traîne en matière d’intégration de la digitalisation dans la construction, mais entre-temps, de plus en plus d’acteurs sont bel et bien convaincus du potentiel – et de la nécessité – du processus de construction digital. Quiconque peut composer un bâtiment de façon optimale avant de le construire, évite en effet de nombreux problèmes onéreux sur le chantier et par la suite. L’image idéale de la digitalisation est un modèle virtuel qui reflète totalement la (future) réalité et qui peut être comparé aux calculs dynamiques, pour démontrer ensuite son utilité comme source d’information sur le chantier.
Dans cette optique, les objets BIM spécifiques au fabricant peuvent jouer un rôle important: en utilisant la version virtuelle d’un produit réel, le modèle est d’autant plus proche de la réalité. On construit alors, façon de parler, directement avec les connaissances et l’expertise du fabricant, avec comme résultat un modèle qualitatif et fiable.

Réduire les frais généraux
Les objets BIM spécifiques au fabricant peuvent contribuer à améliorer l’efficacité du flux de travail. Dans la pratique, on consacre encore beaucoup de temps aujourd’hui au travail de modélisation inutile: dès qu’un projet atteint un certain degré de concrétisation et que les objets paramétriques génériques inclus généralement dans les progiciels ne satisfont plus, de nombreux bureaux vont construire des objets eux-mêmes.
Etant donné que ceci se produit de façon autonome et en fonction du projet, cela signifie un grand coût supplémentaire pour le bureau et engendre tôt ou tard des conflits entre les différents partenaires de la construction et leurs différents modèles. Des projets BIM qualitatifs livrés directement par le fabricant peuvent limiter ces coûts indirects et pourraient relever le niveau de l’efficacité de tout le processus BIM, tant en termes de modélisation que de communication. La question qui se pose toutefois, est de savoir si ce contenu BIM qualitatif et spécifique au fabricant est aujourd’hui déjà disponible.

LES FABRICANTS SONT-ILS BIM-READY?
Objets et bibliothèques
L’offre des projets BIM digitaux commence en tout cas à se développer fortement. Les fabricants dans quasi toutes les branches du secteur de la construction mettent aujourd’hui à disposition des versions digitales de leurs produits, et cela généralement de façon entièrement gratuite. Ces objets BIM sont regroupés dans des bibliothèques, souvent liées à une certaine ligne ou série de produits, et libérés via le site Internet du fabricant. La plupart des fabricants choisissent bel et bien de proposer les objets seulement dans un ou deux formats de fichier, adaptés aux principaux progiciels. L’offre est nettement plus limitée pour ceux qui utilisent un progiciel moins courant.
Fossé entre fabricant et utilisateur
Ceci veut-il dire que chacun doit s’appuyer en masse sur les objets BIM des fabricants de fenêtre, producteurs de chauffage, briqueteries et autres fabricants de matériaux de construction? Pour le moment, non. La disponibilité croissante des objets digitaux ne signifie pas qu’ils disposent effectivement des bonnes fonctionnalités pour réaliser leur potentiel dans le modèle virtuel.
D’après des experts, le fossé entre les attentes du fabricant et le besoin d’informations des utilisateurs reste encore trop grand à l’heure actuelle: le premier veut fournir un objet virtuel qui est un reflet exact de l’objet réel, tant d’un point de vue visuel qu’informatif; le second a besoin d’un objet flexible, interactif, pas trop lourd et généralement générique qui peut supporter tout le processus. Il est vraiment primordial que les fabricants ne considèrent pas les objets purement comme un instrument de marketing avec lequel ils tentent de revendiquer leur place sur le marché digital, mais qu’ils les font coïncider aussi aux besoins concrets des utilisateurs. Ce n’est qu’alors que l’on peut prononcer le mot de BIM-ready.
QUID DES ADJUDICATIONS PUBLIQUES?
A l’heure actuelle, les problèmes fonctionnels ne sont pas les seules entraves à l’intégration d’un contenu BIM spécifique au fabricant. Des obstacles juridiques existent aussi. Car quid des missions publiques, pour lesquelles la description des produits ne peut être que générique? Dans de tels cas, la plupart des objets BIM, avec leur affinage spécifique au fabricant, sont tout simplement inutilisables.
Pour utiliser les objets BIM à grande échelle, on doit en d’autres termes prévoir la possibilité de transposer sur la base des informations spécifiques dans l’objet vers un produit générique afin de satisfaire à la loi sur les adjudications publiques. Le logiciel peut peut-être offrir une réponse et au sein du marché belge, certains fabricants étudient d’ores et déjà toutes les possibilités.
CONCLUSION
Le contenu BIM spécifique au fabricant est, en ce moment, une épée à double tranchant. D’une part, c’est un maillon indispensable dans l’optimisation du processus de construction virtuel; d’autre part, il résulte encore régulièrement dans la pratique en une complication de ce dernier.
Si l’on veut mettre à profit le potentiel complet de ces objets BIM, des efforts sont nécessaires de la part des fabricants comme des utilisateurs. Les premiers doivent mieux faire coïncider la technique et le contenu de leurs objets aux besoins des utilisateurs; les seconds doivent utiliser les objets existants de façon plus consciente. Quiconque est au courant des possibilités et limites spécifiques à un contenu BIM spécifique à un fabricant, saura en effet en faire usage de façon bien plus efficace. Ceci offre bel et bien la perspective d’un gain de temps, d’une meilleure communication et d’une prestation de service plus qualitative.