ARRIVÉE DU NUTRI-SCORE FRANÇAIS EN BELGIQUE
Malgré les désaccords persistants sur son statut juridique
Sur la base de l'expérience française, la Belgique adopte, à son tour, le Nutri-score, et ce, malgré les incertitudes persistantes sur le statut juridique de ce système. Information volontaire au sens du règlement n°1169/2011 (« dit règlement INCO »), ou une allégation nutritionnelle, lorsque le produit obtient une note « verte » ?
INFORMATION OBLIGATOIRE ET VOLONTAIRE

Il convient de rappeler que selon l'article 35 du règlement INCO, outre la déclaration nutritionnelle obligatoire, « la valeur énergétique et les quantités de nutriments […], peuvent être exprimées sous d'autres formes et/ou présentées au moyen de graphiques ou symboles ». Lors de la notification française du Nutri-score à la Commission européenne, les autorités françaises avaient indiqué que celui-ci s'inscrivait dans le cadre de cette disposition.
Mais une interprétation plus exégétique de l'article 35 du règlement INCO a conduit la Commission européenne à estimer qu'il ne s'agissait pas d'une telle forme d'expression complémentaire, car le Nutri-Score ne répète pas - stricto sensu - les informations de la déclaration nutritionnelle, à savoir, la valeur énergétique et les quantités de nutriments.
Aussi, elle considère que le Nutri-Score devrait être vu comme un système d'information supplémentaire, fourni à titre volontaire, au sens de l'article 36 du règlement INCO, qui prévoit la possibilité pour les opérateurs d'ajouter des informations sur l'étiquetage du produit, à condition que celles-ci ne soient pas trompeuses ou ambiguës et qu'elles se fondent, le cas échéant, sur des données scientifiques pertinentes.
Si l'usage de la couleur verte ou de la lettre A relève sans difficultés de la définition d' « allégation », il est plus délicat d'affirmer qu'il s'agit d' « allégation nutritionnelle »
ALLEGATION OUALLEGATIONS NUTRITIONNELLES
Et toujours selon la Commission, le Nutri-Score - en tant qu'il constitue un mécanisme de notation permettant de présenter un produit comme étant bénéfique sur le plan nutritionnel, au moyen de messages ou de couleurs, comme l'affichage de la couleur verte ou des lettres A ou B - répondrait à la définition d'une allégation nutritionnelle. C'est-à-dire,« tout message ou toute représentation, non obligatoire en vertu de la législation communautaire ou nationale, y compris une représentation sous la forme d'images, d'éléments graphiques ou de symboles, quelle qu'en soit la forme, qui affirme, suggère ou implique qu'une denrée alimentaire possède des propriétés nutritionnelles bénéfiques particulières de par l'énergie qu'elle fournit, ou des nutriments, ou autres substances qu'elle contient ».
Or, seules les allégations nutritionnelles expressément énumérées dans l'annexe du règlement n°1924/2006, sont autorisées. Ainsi, si l'usage de la couleur verte ou de la lettre A relève sans difficultés de la définition d' « allégation », il est plus délicat d'affirmer qu'il s'agit d'« allégation nutritionnelle ».
DÉSACCORDS PERSISTANTS
En toute hypothèse, étant donné le succès du Nutri-Score, plébiscité désormais par plusieurs pays - l'Espagne devrait être le troisième pays européen à l'adopter -, il devient primordial de clarifier le statut de ce système. En cas de désaccord persistant, seul un arrêt de la Cour de justice, unique autorité habilitée à interpréter les dispositions de droit européen, pourrait régler définitivement cette question.
L'UTILISATION
Notifié aux services de la Commission, via la procédure TRIS, le 28 septembre 2018, l'arrêté royal relatif à l'utilisation du logo « Nutri-Score » pourrait être officiellement applicable dès le printemps, bien que certains opérateurs belges l'aient déjà adopté depuis quelques mois. L'utilisation de ce système restera à la discrétion de chaque industriel, même si l'arrêté précise que lorsqu'il sera utilisé, le Nutri-Score devra porter sur l'ensemble des catégories de denrées alimentaires qu'un même opérateur met sur le marché sous sa propre marque.
CONSEILS JURIDIQUES
En tant qu'avocate, Katia Merten-Lentz est associée au sein du cabinet Keller & Heckman. Elle conseille les entreprises sur la législation européenne et nationale dans le domaine de l'agriculture et de l'alimentation (sécurité, étiquetage, responsabilité, marketing, réclamations, etc.). Keller & Heckman est un bureau international spécialisé dans le droit de l'alimentation et des boissons, présent à Bruxelles, Paris, San Francisco, Shanghai et Washington. Cette présence internationale donne à Katia et à son équipe l'occasion d'assister les clients dans leurs activités d'exportation, en Asie ainsi qu'aux Etats-Unis.