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CONCURRENCE MORTELLE AVEC L'ETRANGER

Herve Demeyere (Persyn nv) sonne l'alarme en matière de couts salariaux

Le secteur des infrastructures souffre. C'est une lapalissade. Le coût salarial pèse trop lourd. La concurrence avec la main-d'œuvre bon marché étrangère est mortelle. Et la politique traîne dans sa prise de décisions. Guère étonnant que Hervé Demeyere, administrateur délégué de l'entreprise de construction Persyn à Zwevegem et du reste membre du comité de direction de Bouwunie, se fait des soucis. Votre revue professionnelle InfraStructure s'est entretenue avec lui au sujet de Persyn, des exigences du secteur et d'une légère lueur d'espoir au bout du tunnel.

REMERCIEMENTS A BEKAERT

Avec la création d'Aquafin, le marché de l'épuration des eaux est aussi très important pour PersynL'entreprise Persyn nv a été fondée peu après la Seconde Guerre mondiale à Zwevegem par Sylvère Persyn. A l'origine, elle a débuté par les travaux de terrassement, travaux de voirie et travaux hydrauliques. Dans les années 60, les premiers ouvrages d'art (ponts, tunnels et viaducs) ont é été exécutés. En 1985, Frank Persyn a succédé à son père. Celui-ci a cessé son activité en 2007 et la société est tombée dans le giron de quatre ingénieurs via un management buy-out. “En fait, la société avait grandi sous l'égide de l'entreprise voisine, Bekaert, pour laquelle nous avons exécuté bon nombre de missions", précise l'administrateur délégué, Hervé Demeyere. “Avec la création d'Aquafin, le marché de l'épuration des eaux est aussi devenu particulièrement important pour nous. Tant les travaux d'égouttage que les stations d'épuration. Très récemment, nous avons encore étendu nos activités selon la simple logique que si nous pouvions placer des égouts, nous pouvions également placer des canalisations d'eau et des conduites, moyennant une certaine forme de spécialisation, bien entendu. Mais entre-temps, nous continuons de nous intéresser à nos clients industriels."


LES ANCIENNES ROUTES, FONDEMENT DE NOUVELLES

Le parc de machines Persyn comporte, e.a., 8 camions, 2 grues mobiles sur camion, 30 grues sur chenilles, 2 grues sur pneus, 2 grues télescopiques et 5 grues à tourPersyn exécute de nombreux travaux pour l'industrie. “De nombreux travaux de voirie et de canalisations certes, mais également de nombreux bâtiments", précise Demeyere. “Le client demande un interlocuteur unique pour un bâtiment complet. Nous nous y sommes spécialisés. Bien entendu, nous recourons à des sous-traitants spécialisés pour le parachèvement, mais nous restons la personne à contacter pour le client. Persyn est une vraie entreprise de construction et a une centrale à béton. En effet, les travaux de voirie engendrent un certain flux de déchets que nous voulons contrôler autant que possible. Les anciens revêtements routiers sont démolis ici jusqu'à la bonne fraction et nous la réutilisons dans des fondations à base de ciment. De cette manière, nous avons nettement moins de perte. Quand même nettement moins que par le passé, lorsque tout était évacué vers une décharge. Un bel exemple de concordance entre économie et écologie. Nous n'avons pas l'ambition d'être les premiers sur le plan écologique, mais très souvent, des interventions économiques ont également un rendement écologique, comme le remplacement de notre éclairage énergivore par des exemplaires plus économiques. Nous remplaçons aussi notre parc de machines tous les quatre ans, à chaque fois par des machines plus écologiques."


REMPLACEMENT DE CINQ PONTS DE CHEMIN DE FER

Un très bel exemple d'une mission typique pour Persyn est le remplacement de cinq ponts de chemin de fer entre Erpe-Mere et Wetteren. “Une étude d'Infrabel a montré que les ponts ne pouvaient pas être rénovés et devaient être remplacés par des exemplaires en béton. En outre, il fallait respecter les nouvelles normes dans l'optique de l'extension de deux à quatre lignes ferroviaires. Par pont, nous disposions d'un week-end pour démolir l'ancien pont et d'une petite année pour construire un nouveau pont. Infrabel dispose de son propre système de coffrage métallique pouvant être placé sur les voies en une nuit, afin de gêner le moins possible le trafic ferroviaire. Dès que ce coffrage est placé, nous pouvons travailler en sécurité, tandis que le trafic normal reste possible. Nous venons juste d'achever cette mission. Le cinquième et dernier pont a été achevé juste avant les congés du bâtiment."
“Aujourd'hui, les entrepreneurs belges doivent se demander si cela vaut encore la peine d'investir dans leur propre personnel“

LE COFFRAGE METALLIQUE AUTORISE LE TRAFIC FERROVIAIRE

Très spécifique aux ponts en arc surplombant la voie ferrée entre Erpe-Mere et Wetteren est le coffrage métallique d'InfrabelTrès spécifique aux ponts de chemin de fer est le coffrage métallique utilisé par Infrabel, mais tout autant la composition du béton à couler. “En fait, les ponts de chemin de fer sont des ponts en arc", explique Hervé Demeyere. “En principe, le béton est liquide. En fait, la partie inférieure doit être coulée la plus rigide possible, de telle sorte que le béton ne s'écoule pas en dehors. En même temps, il ne peut pas être trop rigide, car autrement, cela crée des cavités, parce que le compactage est compliqué. Trouver l'équilibre est souvent affaire de minutie. Pour le tester, nous avons effectivement érigé un chant oblique et testé quelque types de béton. Pour tester la fluidité du béton, on en a versé un 'échantillon' dans un cône. Quand le cône est rempli, il est hissé. Ce faisant, le béton s'écoule en dehors. Le diamètre du béton écoulé est une mesure pour exprimer la fluidité du béton. Lorsqu'une bétonnière sur roues arrivait sur le chantier, le béton était résolument testé de cette façon. Et de temps à autre, il était renvoyé."


INCIDENTS SUR CHANTIER

“Nous contrôlons toujours que ce qui figure sur les plans, correspond effectivement à la réalité, via, entre autres, des sondages. Un accident est vite arrivé”Tout n'était pas toujours rose sur le chantier, c'est une lapalissade. Persyn n'a pas été épargné par les petites et de temps à autre plus grandes bagatelles. “C'est vrai. A Vlierzele, une grue a failli plonger lors de la démolition d'un pont, du fait qu'une cavité est apparue ensuite dans le pont, alors que les plans indiquaient que cette cavité avait été rebouchée. Heureusement, le grutier a eu la présence d'esprit de déployer sa flèche, ce qui a permis d'éviter le pire.

Nous apprenons constamment de tels incidents. Maintenant, nous contrôlons toujours que ce qui figure sur les plans, est effectivement conforme à la réalité, via des sondages, par exemple. Un autre cas qui nous concernait peu personnellement, s'est produit un peu plus loin à Westrem. Malgré toute la signalisation, un automobiliste éméché a effectué un plongeon. Cet homme a eu la chance de sa vie, car il a atterri juste entre les voies et les barres d'attente en acier. Un mètre vers l'avant ou vers l'arrière, et il était tué sur le coup. Impensable."

DIFFERENCE DE COUT SALARIAL

Un thème important dans la concertation entre le secteur de la construction et les autorités publiques est actuellement la concurrence des entrepreneurs étrangers qui travaillent souvent à des prix ridiculement bas. “Les entrepreneurs belges doivent aujourd'hui se demander si cela vaut encore la peine d'investir dans leur personnel ou s'il vaut mieux engager des sous-traitants étrangers pour leurs projets. Un ouvrier belge coûte rapidement 33 à 35 euros par heure à son employeur. Les ouvriers étrangers coûtent 26 euros ou moins. La différence est trop grande. Pour un gestionnaire-chiffreur, ce problème est donc évident: il s'agit de ne plus investir dans un personnel belge. Mais heureusement, ceci n'est pas si simple. En tant que gérant, vous essayez de grandir via une bonne politique, de manière à pouvoir engager du personnel sans trop de problèmes, même s'il s'agit d'une profession en pénurie. Changer complètement votre fusil d'épaule et choisir les ouvriers étrangers, c'est aller trop loin. Du moins pour le moment. Notre demande adressée aux politiciens est d'abaisser le coût salarial de six euros. Il peut y avoir une différence avec les ouvriers étrangers, mas elle doit rester limitée. C'est la seule façon pour que nous continuions d'investir dans notre personnel. On parle maintenant d'un 'tax shift' qui ferait évoluer la cotisation patronale de 33% à 25%. Je ne sais pas encore ce que cela impliquera concrètement en termes d'évolution du coût salarial, mais cela ne représentera qu'une différence maximale d'un euro. C'est un début, mais certainement pas une finalité. Il reste pas mal de lobbying en perspective pour Bouwunie (sourire)."

REELLE MENACE

Demeyere envisage un avenir sombre, si le gouvernement ne se penche pas d'urgence sur une telle baisse des coûts salariaux. “Si rien ne se produit, de plus en plus d'ouvriers étrangers seront actifs ici à court terme. Ils paient des cotisations sociales dans leur pays d'origine, et pas en Belgique, où ils sont actifs. Ceci signifie donc nettement moins de recettes pour l'Etat belge. Cependant, l'Etat belge perd encore plus de recettes. L'ouvrier étranger dépense une grande partie du revenu dans son pays d'origine pour entretenir sa famille. Un ouvrier belge dépense son revenu en Belgique et fait ainsi tourner notre économie et génère plus de recettes pour le gouvernement belge par le biais de la TVA. Ces deux dernières années, 2.000 ouvriers du bâtiment ont disparu dans les entreprises d'infrastructure flamandes. D'un autre côté, nous voyons de plus en plus d'ouvriers étrangers qui sont employés par des sociétés étrangères qui travaillent dans notre pays. Si nous voulons offrir un avenir à nos ouvriers du bâtiment, il n'y a pas d'autre option que d'abaisser drastiquement ce coût salarial. En tout cas, je ne vois pas d'autre alternative."

CONTROLES POUR TOUS

Pour l'industrie, Persyn exécute de nombreux travaux, et de nombreux bâtimentsOutre un coût salarial abaissé, Bouwunie est demanderesse, par la bouche de Hervé Demeyere, de contrôles plus cohérents, également au niveau européen. “La loi dit qu'un ouvrier qui vient travailler dans notre pays, doit être payé selon les barèmes salariaux de notre pays. Un chef d'équipe dans une société étrangère doit être payé autant que son collègue belge. Peut-être bien que cela se produit sur papier, mais on connaît assez de cas en vertu desquels un tel chef de chantier étranger doit restituer en cash une partie du salaire à son employeur. Et ceci ne lui pose pas de problème, car en venant travailler ici, il peut gagner grosso modo 30% de plus que dans son pays d'origine. Disons qu'il doit abandonner 20% de ces 30%. Il garde encore 10% en net. Une situation gagnant-gagnant pour l'individu en question et pour son employeur. Mais l'Etat belge et les entreprises autochtones en sont les dupes. L'Etat est grugé de recettes et nous sommes confrontés à une concurrence déloyale. C'est pourquoi nous demandons expressément que de telles sociétés de construction soient autant contrôlées que nous. Nous insistons fortement là-dessus, car une éventuelle baisse des coûts salariaux n'aura d'effet que si de telles situations intolérables sont éradiquées. Nous espérons aussi que Marianne Thyssen, commissaire européen au Travail, prendra l'une ou l'autre initiative au niveau européen."

“Nous gardons l'espoir en l'avenir, mais il est clair que certaines choses doivent changer“ 

LES MISSIONS SONT RARES

“Il est minuit moins cinq", affirme Demeyere. “Avec Persyn, nous nous sommes constitué comme un bon père de famille un bas de laine durant les bonnes années, mais celui-ci s'amenuise petit à petit. Il est temps d'agir, car cette situation ne peut plus durer très longtemps. Le secteur des travaux d'infrastructure travaille déjà depuis un an et demi à prix de revient ou juste en dessous, rien que pour obtenir des missions. Et ces missions se raréfient constamment. Tous les gouvernements, à tous les niveaux, doivent économiser, ce qui fait que les travaux sont souvent reportés. Les rares travaux qui sont bel et bien adjugés, entraînent tellement de soumissionnaires que les prix sont irréalistes. De plus, de nombreux budgets publics concernent aujourd'hui de très grands projets PPP, tels que l'A11 à Bruges ou la liaison Oosterweel à Anvers. Ces projets mastodontes sont décrochés par de très grands entrepreneurs qui travaillent d'ores et déjà avec peu d'ouvriers belges. Une lueur d'espoir: nous constatons à nouveau plus d'activité chez nos clients industriels qu'il y a quelques années. La confiance des entrepreneurs s'améliore, on veut à nouveau engager et les investissements reportés sont à nouveau sortis des tiroirs."

QUAND MEME VISER LA CROISSANCE

Précisément en attirant les activités industrielles, Demeyere espère pouvoir stabiliser le chiffre d'affaires à 25 à 30 millions d'euros (voir évolution du chiffre d'affaires). “Ce faisant, nous devons être capables de garder nos presque cent ouvriers. Notre ambition est de continuer de croître constamment dans les marchés où cela est possible. Un des marchés qui offrent des possibilités, est le marché wallon. Nous y sommes déjà actifs, mais nous voulons encore nous y engager de façon plus intensive. A Zwevegem, nous nous trouvons quasi à la frontière linguistique. Il est seulement dommage qu'il soit si difficile de pénétrer le marché du Nord de la France. De nombreux réflexes protectionnistes et chauvinistes nous compliquent fortement la tâche. C'est un hinterland important que nous ratons, proche de Zwevegem. Nous gardons l'espoir en l'avenir, mais il est clair que certaines choses doivent changer", conclut-il.

LOBBYING VIA BOUWUNIE 

Hervé Demeyere joue un rôle très actif dans Bouwunie. “Cela fait plus d'un an que je fais partie du département construction Infra au sein de Bouwunie. J'y partage mes connaissances des travaux de béton et nous nous concertons en tant que secteur avec, par exemple, Aquafin sur, entre autres, les stations d'épuration. Depuis un mois, je siège également dans le comité de direction de Bouwunie. Persyn s'est affilié à Bouwunie dès le début et recourt à ses services pour des questions spécifiques relatives, par exemple, à la législation sociale ou la législation sur la construction. Ses conseils sont toujours appréciés. Le beau-frère de Frank Persyn, Jef Van Cauwenberghe, a aussi siégé dans Bouwunie. Lorsqu'il a cessé ses activités, il m'a demandé de reprendre l'une ou l'autre chose, et tout s'est enchaîné. A mes yeux, Bouwunie offre une très bonne prestation de services à tous les entrepreneurs et effectue d'importants travaux de lobbying auprès des décideurs politiques. Lorsque l'entrepreneur individuel que vous êtes, adresse un courriel avec ses souhaits à un ministre, il est probable que ceci aura peu d'effet. Mais quand Bouwunie prend position et peut ajouter dans la foulée qu'elle représente 8.000 entrepreneurs, elle est souvent écoutée. J'estime qu'il est intéressant d'être également actif à ce niveau."

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Écrit par Jan De Naeyer

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